J’avance sur le port de feu et de misère,
D’un côté des marins, de l’autre des enfants,
Ils se ressemblent tous, s’amassent comme des pierres,
Devant mes yeux brûlés qui scrutent le néant.
Le néant, la poussière, et cette foutue galère.
Paraît qu’un monde heureux c’est un monde qui rie,
Mais il chiale toujours, comme un ciel pleins d’orages,
A chacun des contours de toutes nos patries,
Le ciel pleure, inonde, les contrées de sa rage.
Et nous voilà lancer dans un nouveau naufrage,
Le néant, la poussière, et cette foutue galère,
Oh bien triste mystère !
Allons donc mon amour, allons pour le naufrage,
Ce n’est pas le voyage,
C’est le temps des colères,
Approche ton visage,
Allonge toi contre terre,
On part
Du néant, en poussière,
On part pour le mystère.
J’avance sur le port, l’embarcadère est vide,
Plus personne aux abords, pas même un vieux marin,
Qui serait là couché, le visage plein de rides,
D’avoir vécu autant qu’on n’veux plus du matin,
Le néant, la poussière, et les années de guerres.
Sur le pont des bateaux je vois danser des ombres,
C’est peut être mon cerveau, mais mes yeux les regardent,
Ces reflets de nous deux, de nos silences sombres,
Ressemblent à des pantins, sous la lune blafarde,
Aussi libres, aussi biens, que personne s’y attarde.
Le néant, la poussière, et cette foutue galère,
Etait-ce donc bien un éternel mystère ?
Allons donc mon amour, allons pour le naufrage,
Ce n’est pas le voyage,
C’est le temps des colères,
Approche ton visage,
Allonge toi contre terre,
On part
Du néant, en poussière,
On part pour le mystère.